Entretien réalisé en Janvier 2018 à angoulême,
en présence de françois de jonge, A. Achard, — C. de Trogoff de TrogofF.

— C. de Trogoff Merci François d'avoir répondu...
— François De Jonge. Merci Laurent
(rires)
— François De Jonge De rien.
— C. de Trogoff Bon, on est là pour parler, en fait, des rapports entre la technique et la production. Pour ma part, ce qui a lancé l'idée de ces entretiens, c'est de voir, heu, comment, en quoi la prise en main des techniques nouvelles, au cours du temps, peut influencer le contenu, ou pas d'ailleurs, de la production notamment de fanzine ou d'objets.
Dis-nous d'abord comment tu as commencé dans quelles circonstances et avec quoi, si tu veux bien...
— François De Jonge Du coup, moi, je sors d'une école d'art en photo et peinture, du coup, j'étais artiste peintre quand je suis sorti... Et j'ai rencontré un de mes amis à l'école qui était, lui, en bd et il m'a proposé de travailler avec lui pour monter une boite d'édition qui s'appelait Nos restes1. Donc ça c'est vieux, ça marche plus... Il m'avait donc proposé ce travail avec lui là-dedans, du coup on a fait un bouquin, un bouquin un peu comme ça, de même gabarit et même couleur.
— C. de Trogoff Dos carré collé...
— François De JongeQui était pas très beau, mais on est allé à Angoulême avec. Et à ce moment-là, je faisais surtout du dessin et de la peinture.
— C. de Trogoff De combien d'exemplaires on parle, pour avoir une idée ?
— François De Jonge Je crois 500, 300 exemplaires peut-être...
— C. de Trogoff Avec l'idée de le vendre quoi, vraiment ?
— François De JongeOui, mais c'était sans connaître du tout le milieu du fanzine, ni connaître le milieu du livre, pour ma part en tout cas, car j'étais pas du tout dans ce milieu...
— C. de Trogoff Il y avait des techniques particulières déjà mises en œuvre ?
— François De Jonge C' était tout simple : offset, couverture souple.
— C. de Trogoff Tout délégué à l'imprimeur...
— François De Jonge Oui, c'était l'imprimeur, un PDF à l'imprimeur. Donc, on était venu à Angoulême et de cette expérience, j'ai eu envie de faire de la B.D., en fait. C'était de venir à un Angoulême qui m'a donné envie de...
— Alexandra Achard c'est de venir ici ?
— François De Jonge Alors que c'est le chemin inverse normalement, j'ai l'impression : normalement, à la base, c'est plus : tu fais de la bd et après tu viens... Moi, c'est le fait de voir de la B.D. qui m'a donné envie, dans un milieu qui est vraiment pas du tout le plus approprié, de faire de la B.D.
— C. de Trogoff Oui, et puis de faire autre chose... Plus que ça... Parce que, finalement, ta production est assez...
— François De Jonge Je faisais des livres aussi, à la base, avec le dessin. À l'école, quoi.
— C. de Trogoff Tu t'étais déjà lancé des défis techniques au pas du tout ?
— François De Jonge Non, c'est venu beaucoup plus tard et ça vient même pas de moi mais de mon collaborateur. Du coup, je fais Nos restes, un Angoulême, je rencontre Francesco Defourny (ndlr : du fanzine Mycose, qui signe Manuel) le type faisait le fanzine George.
— C. de Trogoff Oui, je me souviens très bien.
— François De Jonge Il venait de l'édition Mycose, du collectif, et il avait envie de faire son propre fanzine
— C. de Trogoff : Tu Connais ça Alexandra ? Je te montrerai...
— François De Jonge Et il me demande de faire des planches pour George. C'est comme ça que j'ai commencé à connaître le fanzine. Et à côté je faisais mes propres productions avec Nos restes, donc des histoires sur un petit nain en fait,
— C. de Trogoff D'accord...
— François De Jonge C'était de l'autobiographie, en fait, mais un peu en fiction...
— C. de Trogoff Là tu t'appropriais les objets… Tu utilisais des techniques particulières, ou là encore tu déléguais ?
— François De Jonge Je faisais tout au rotring, je faisais la maquette...
— C. de Trogoff Ah, tu faisais ta maquette, déjà...
— François De Jonge Oui, on a toujours fait la maquette, depuis le début, on faisait toujours la maquette sauf que j'avais aucune connaissance de In design, PhotoShop, tout ça, du coup ma maquette je la faisais sous PhotoShop...
C.Ça existait donc déjà.
— François De Jonge Oui oui, ça existait, oui.
— C. de Trogoff On est dans quelles années là ?
— François De Jonge Vers 2007-2008, je suis jeune hein !..
— C. de Trogoff Oui, oui mais c'est pour... C'est parce que... (Rires de A.)… On va faire par décennies, tu vois. Quand on va interroger Robert Varlez, lui, il a commencé dans les années 70... Il y aura d'autres...
— Alexandra Achard Il y a des indices...
— François De Jonge Mais tu vois bien...
— C. de Trogoff Oui je vois bien, il y a des indices mais détromp...
— François De Jonge Je suis rasé, je suis chauve mais...
— C. de Trogoff Je vois bien mais... Yannis, par exemple, est jeune mais il a commencé très tôt il a dit qu'il avait 32 ans mais il a commencé a 15 ans donc, du coup, tu vois... Il est vieux dans la profession. II y a des gens qui commencent tard, qui viennent d'ailleurs, donc c'est vrai il y a des indices mais tu aurais pu être là depuis très longtemps ou pas.
— François De Jonge Ben non, en fait je débarque ; ça fait un peu plus de 10 ans maintenant.
— C. de Trogoff C'est très intéressant, en fait complètement dans un autre... Temps
— François De Jonge Et c'était pas ma motivation première de faire de la B.D. Donc, du coup :George.

Francesco me présente d'autres personnes comme Blanquet, comme Jean-Christophe Menu… Et du coup je commence à évoluer dans un dessin plus sombre, plus... Forcément.
— C. de Trogoff Moins autobiographique du coup?
— François De Jonge Plus du tout. Enfin, y'a toujours une forme d'autobiographie quand tu vas dans des recoins sombres de tes... Pensées… Mais c'est toujours avec un recul de...Du coup, je fais ça... Y'a la Tranchée Racine qui sort, il y a Lapin qui revient… Du coup je fais quelques... Il y a sept ou neuf numéros ? Je sais plus.
— C. de Trogoff La nouvelle version, je sais pas... On n'en a pas beaucoup. Et l'appropriation des objets?
— François De Jonge À ce moment-là, j'envoie mes dessins et voilà, ça s'arrête là. Pendant ce temps, il y a Superstructure qui émerge parce qu'on commence avec Francesco à faire des expos autour de tout ce qui est sous forme d'abri.
C.Oui...j'en ai vu une, une année à Angoulême d'ailleurs, il fallait entrer dans une structure...
— François De Jonge Pas l'année dernière
C.Une année, à Angoulême, je suis rentrée dans ta structure dans le off
— François De Jonge Non, le Foff
— C. de Trogoff Le offoff ?
— François De JongeNon, pas offoffoff, le Foff, c'est super important ça !
— C. de Trogoff Mais il y a eu eu tellement de versions de...
— François De JongeOui mais c'était la meilleure !
— C. de Trogoff C'était très bien d'ailleurs, cette expo, c'était génial.
— François De Jonge C'était beaucoup plus tard.
— C. de Trogoff On peut déjà en parler un petit peu ?
— François De Jonge Non, on va d'abord un peu parler de Superstructure.
C.Ce que je voudrais savoir, c'est à quel moment tu t'appropries réellement l'objet livre. La fabrication des choses comme ça.
— François De Jonge La structure arrive, je suis encore dans George
— C. de Trogoff tu es encore dans George ? ! (rires)
— François De Jonge George sans S., quoi, y'a pas de quoi rire ! il n'y a pas de jeux de mots, il n'y a rien.
C .Ben, si, tu étais dans George...
— François De Jonge Avec George, parce que je ne suis pas à George, j'ai juste participé.
— C. de Trogoff Oui, tu envoyais tes planches, juste.
— François De Jonge je n'avais aucune manipulation sur l'objet, j'envoyai juste mes planches. Il y a eu donc Tranchée Racine et Lapin.
— C. de Trogoff Je peux quand même te poser une question? Tu dis que tu n'avais aucune action sur l'objet... On se demandait avec Alexandra : est-ce que les auteurs, quand ils créent leur planches, pensent au format définitif ou à la forme que va avoir l'objet ? Et de quelle façon va recevoir le lecteur ?...
— François De Jonge Comment ça?
— C. de Trogoff Heu... Le format, avec qui tu es... Est-ce que c'est des choses que tu pensais par exemple, que tu penses ?
— François De Jonge Oui, c'était logique parce que le format de Franscesco...
— C. de Trogoff Oui je me souviens de George
— François De Jonge En tant qu'éditeur, il envoyait à tous les auteurs ce qu'il fallait faire
— C. de Trogoff Ah... Génial !
— François De Jonge Le format, ce qu'il fallait faire, A5, noir et blanc, le niveau de gris, DPI etc.
— C. de Trogoff Il fait partie de ces gens ? OK. Parce que, quand on en parlait avec Yannis, c'est pas toujours le cas exactement, et c'est comme ça que je commence à comprendre comment comment faire un livre.
— Alexandra Achard Et comment ça fonctionnait.
— François De Jonge Du coup avec George, c'était toujours A5, avec Lapin c'était toujours un format comics et avec Blanquet, lui, c'est différent ; ça dépendait de ce qu' il avait besoin, en fait dans son rhodoïd, c'était plein de brole. Il te disait : j'ai besoin d'un truc de 5/5, une bande une colonne...
— C. de Trogoff Ah oui, il est très précis. Du coup, je savais pas qu'il procédait ainsi… D'accord, ouais ouais...
— François De Jonge Après, on pouvait proposer et, de là, il pouvait imaginer d'autres choses, aussi.
— C. de Trogoff Plus ont va vers des éditeurs qui produisent des objets, un peu, dans des formats différents, des formes... Tu vois ? Des auteurs qui s'en préoccupent et qui voient aussi à côté qui ils sont et qui pensent leur planche de cette façon, et puis d'autres qui s'en préoccupent pas du tout.
— François De Jonge Ouais. J'ai l'impression que maintenant, enfin, c'est une parenthèse, mais ici cette année j'ai pas l'impression de voir ça, en fait. Il y a certaines préoccupations, quand j'ai été au spin off et tout ça, t'as pas trop d'objet… Enfin, l'objet reste toujours un format fanzine A6 A5 . Mais ça, c'est pas intéressant. Ça n'amène rien. C'est pas pratique.
( rires)
— François De Jonge C'est vrai. Bref.
— C. de Trogoff Donc on en est toujours à George... Et un peu Blanquet du coup
— François De Jonge Avec George, ont fait des expos.
— C. de Trogoff Ça prend qu'elle forme ça ?
— François De Jonge Installations, dessins, agrandissements de dessins...
— C. de Trogoff Et du coup, qu'est-ce que tu fais ? Tu t'appropries des choses...
— François De Jonge Je commence à travailler le carton ; je commence à faire les cabanes.
— C. de Trogoff Raconte un peu ça : est-ce que tu te lances des défis ? Ces cabanes qu'est-ce que ça?
— François De Jonge À ce moment-là je n'avais aucune… Encore une fois, je n'avais aucune expérience dans l'installation.
— C. de Trogoff Ces cabanes, c'est des livres ? Elles sont faites pour être lues ou elles sont vraiment faites pour être manipulées ? Pour être pénétrée ?
— François De Jonge Non elles sont fixes. C'est des espaces dans lesquels on fait des expos. On créée des espaces dans lesquels on montre des dessins.
— C. de Trogoff D'accord, O.K. Il y a un peu d'original...
— François De Jonge Déjà, j'ai jamais trop été intéressé par "montrer des planches"
— C. de Trogoff oui je trouve ça...
— François De Jonge Ça doit venir de la photo en fait
— C. de Trogoff Exactement. La photo ... Montrer des photos... Sur des murs...
— François De Jonge Je ne sais pas si le photographe te dira la même chose, mais moi je vois ça comme ça.
— C. de Trogoff Je vois pas l'intérêt.
— François De Jonge Il y a aussi la question du tirage...
C.Tu n'as pas vu, Alexandra, mais on va en reparler : une année à Angoulême, on pouvait pénétrer dans une de ces cabanes. On vivait une expérience on entrait dans Superstructure d'une certaine façon.
— François De Jonge C'était celle où il y avait plein de planches et tout ça.
— C. de Trogoff Ouais. Il y avait une espèce de petit igloo, peut-être, je m'exprime mal, mais on rentrait dedans et on était entouré de structures...
— François De Jonge Cette expo fait partie de trois expos, l'une à la suite de l'autre euh, avec le même bagage structurel mais dans des lieux différents. Il en avait deux à Bruxelles et la dernière Angoulême. À Bruxelles, une en librairie pour le lancement du livre, la deuxième cétait dans un lieu d'expo.
— C. de Trogoff Donc pour Superstructure...
— François De Jonge toujours, là, c'est Superstructure et je ne suis déjà plus dans George et dans Tranchée Racine, il n'y a plus que le Superstructure. Si tu veux on fait un bond, sinon on continue.
— C. de Trogoff Non, parce que tu disais que tu t'appropriais le carton, les choses et ça, ça nous intéresse beaucoup
— François De Jonge Ça, ça fait partie de
— C. de Trogoff Raconte ça : les défis, les difficultés techniques, et quelles formes ça peut prendre la résistance du matériau etc.
— F.
Du coup, c'était assez... Ça a toujours été très bringuebalant, mes installations. Enfin, avec le temps, on arrive à trouver des solutions pour que ce soit sécure, mais en même temps on aime cette espèce d'équilibre entre « ça tient », et « ça tient pas ».
— C. de Trogoff C'est recherché même ?
— François De Jonge Je reviens au premier : le premier, c'était que du carton sur châssis de bois que je construisais.
— C. de Trogoff Donc, l'idée vient d'une expo qu'on se demande...
— François De Jonge C'était ma toute première expo en tant qu'auteur seul et en tant qu'auteur de BD. Et c'est Francesco qui me la propose au salon Culture Maison à Bruxelles.
— C. de Trogoff Je connais par Robert
— François De Jonge C'était le deuxième salon Culture Maison, là, et je propose, parce que dans cet espace qui avait pas tellement de possibilités quant à l'exposition
— C. de Trogoff Ah c'est la contrainte du lieu qui t'impose une...
— Alexandra Achard Contrainte technique.
— François De Jonge Je sais pas si c'est la contrainte du lieu, c'est ma propre contrainte, de me dire : j'ai pas envie
— C. de Trogoff Tu te lances un défi...
— François De Jonge J'ai pas envie de montrer ça sur des murs. J'ai envie de montrer ça ailleurs, ce sont mes murs que je construirai
— C. de Trogoff Du coup, tu te dis » je vais faire du bois », « je vais faire du carton », tu te dis des choses de ce genre à ce moment-là ?
— François De Jonge Il y a le carton...
— C. de Trogoff Que tu aimes déjà ?
— François De Jonge Que je n'aime plus trop depuis
— C. de Trogoff Oui, mais on parle à cette époque-là : l'homme que tu étais aimait le carton ?
— François De Jonge Cette idée du carton vient d'auparavant, de Nos restes, où on faisait déjà des expos. C'était vraiment du dessin aux murs et j'avais déjà fait l'expérience...
— C. de Trogoff Et tu le faisais déjà pour toi, personnellement en tant qu'artiste, tu faisais des choses en carton ?
— François De Jonge Je faisais des petites maquettes.
— C. de Trogoff D'accord.
— François De Jonge Des maquettes d'abris.
— C. de Trogoff Déjà l'abri.
— François De Jonge En fait, le carton, je le peignais en blanc et je redessinais au rotring par dessus. Je créai des saynètes comme ce qu'il se passe dans mes dessins BD, sauf que c'était que c'était de la 3D.
— C. de Trogoff Génial !
— Alexandra Achard Du volume.
— C. de Trogoff C'est génial ça !
(Rires)
— Alexandra Achard Ça me plaît beaucoup.
— C. de Trogoff Tu vas voir des yeux qui vont pétiller...
— François De Jonge Je fais plus ça, c'est fini.
— C. de Trogoff Oui mais elle va demander à voir les premiers !
— Alexandra Achard Oui.
— François De Jonge J'ai encore des trucs chez moi...Enfin ; dans le livre, il y a une carte… On voit la photo de ces cabanes
— C. de Trogoff Oui je me souviens de ça maintenant.
— François De Jonge D'ailleurs, ce truc faisait partie de la première expo avec la petite cabane, là, à Culture Maison, c'était le lancement...
— C. de Trogoff Et du coup, une fois que tu t'es confronté au matériau, le carton, la peinture, le rotring, ce que tu utilises... Parce que ce qui nous intéresse beaucoup c'est la technique... Confronté à ces matériaux, est-ce que ça t'oblige à prendre une certaine forme dans ton travail, est-ce que le matériau te contraint ? Est-ce qu'il y a une résistance du matériau qui te pousse ou tu restes le maître ?
— Alexandra Achard Ou l'inverse.
— C. de Trogoff Est-ce que tu le domptes ?
— François De Jonge J'essaye de pouvoir dessiner des choses qui m'intéressent et de pouvoir les toucher par la suite et en faire quelque chose de proche de ce que je dessine, en fait.
— C. de Trogoff Les toucher, les manipuler ?
— François De Jonge Les grands formats que je dessinais avant, c'étaient toujours des vues un peu délabrées, avec, beaucoup, des tas ; et il y avait pas mal de palettes et de carton et de détritus, en fait...
— Alexandra Achard Même si tu les as pas, là, tu les dessines.
— François De Jonge Ouais, la base vient du dessin, l'envie de ces matériaux, travailler avec ces matériaux, en réel.
— Alexandra Achard se dire : « bon, on va aller les prendre directement, quoi »
— François De Jonge Je vais en venir à Superstructure maintenant.
— C. de Trogoff Alors, Superstructure, l'idée, comment ça naît ?
— François De Jonge Superstructure vient de ces idées d'installations et de création de bouquins à côté. Faire un bouquin et le présenter dans une installation.
— C. de Trogoff Ah, il y a déjà cette idée d'une installation pour accompagner.
— François De Jonge Dès le premier bouquin qui était en cours avec Francesco, on était à deux dessus. Il résulte d'une résidence qu'on a fait pendant une semaine et demie dans un théâtre dans lequel on a construit un abri antiatomique tout en carton.
— C. de Trogoff Oh !
— François De Jonge Toute la matière qui est dans le livre est le résultat de ce qu'on a fait pendant cette semaine.
— Alexandra Achard Vous avez fait l'abri antiatomique dans le théâtre et ça a produit le livre ?
— François De Jonge On a créé, donc, l'espace avant l'ouverture et pendant une semaine, soit on travaillait sur l'espace, soit on continuait à faire des trucs, soit on dessinait des planches autour de la thématique de la survie.
— C. de Trogoff Donc l'idée du livre, l'idée de structure était déjà là par contre.
— Alexandra Achard Et l'exposition sert de base pour la création du livre. Vous mettez en place un processus créatif ou un endroit…
— François De Jonge On crée une résidence.
— C. de Trogoff La résidence a été cherchée pour faire le livre, ou vous avez fait feu de tout bois ?
— François De Jonge Non, on s'était dit... À ce moment-là il y a aussi...Toute une période : théâtre et danse.
— C. de Trogoff Ah, ben raconte-nous.
— François De Jonge...
— C. de Trogoff Non, t'as pas envie ? D'accord.
— François De Jonge Si, on peut, mais... C'est assez basique ; mon frère fait un spectacle et il y a quand même pas mal de choses qui nourrissent mon projet, parce que ça se passe dans la forêt... Quelqu'un seul, il doit se débrouiller dans la forêt et se construire un abri.
— C. de Trogoff Ben, si c'est intéressant... Le contexte... Après, peut-être toi, ça te paraît anecdotique...
— François De Jonge Non, c'est clairement issu, ça nourrit le projet... Et donc le théâtre me connaît et ils me proposent de faire une résidence sachant que je dessine. Je propose au théâtre de venir à plusieurs...
Intermède : annonce haut-parleur du festival (commentaires et rires)
— Alexandra Achard Moi, j'ai le sentiment… Tout-à-l'heure tu expliquais : « moi j'étais artiste peintre », tu as utilisé ce mot là
— François De Jonge Plus la photo...
— Alexandra Achard T'arrives à Angoulême, tu pars sur autre chose ; moi j'ai plutôt l'impression que c'est cette notion d'abri et de construction qui va infuser, ou contaminer tous les moyens possibles, puisque tu as l'air de dire que là, sur le théâtre, toute l'expo que vous avez fait dedans, y'a encore cette notion là.
— François De Jonge Oui...
— Alexandra Achard le spectacle avec ton frère qui fait encore extension, un traitement… Ça prend des facettes...
— François De Jonge J'ai l'impression que cette thématique, elle est peut-être vue partout, en fait, en tant qu'artiste on essaye de survivre.
— C. de Trogoff Et tu t'exprimes avec différents moyens... Ton sujet...
— Alexandra Achard L'abri est la constitution de la personne.
— C. de Trogoff ton sujet il perfore dans ton univers autour de toi, et ça fait des extensions...
— Alexandra Achard C'est quand même une personnification, l'abri. C'est entièrement lié à ce que ça abrite, ça n'existe pas sans ça.
— C. de Trogoff De quoi ça abrite aussi : avec le monde extérieur, il y a une sorte de limite, la structure, tout ça, les facettes...
— François De Jonge Bref !
— C. de Trogoff Et donc naissance de Superstructure pour ce livre…
— François De Jonge Naissance de Superstructure, un A5, couleurs, différents papiers, déjà, à ce moment-là.
— C. de Trogoff Et ça je pense que je l'ai. On a suivi depuis le début...
— François De Jonge Il y a différents papiers, il y a la couleur, il y a cette idée de travailler avec d'autres.
— C. de Trogoff C'est un truc qui se déplie ?
— François De Jonge non, c'est juste un agrafé, un A5 agrafé avec du papier journal au milieu... Un papier bouffant. Et il y a déjà cette envie de créer des livres pas seulement faits en agrafé, avec plein de papier... à ce moment-là, on se sépare avec Francesco, pour qu'il puisse travailler sur ses projets et il voit que ça peut vite évoluer vers autre chose et c'est pas forcément ces choses-là qui l' intéressent. Moi je me retrouve seul à gérer Superstructure...
— C. de Trogoff Tu la gères à ton niveau, c'est ta structure.
— François De Jonge J'ai enfin une structure, à moi.
— C. de Trogoff Métaphorique.
— François De Jonge Qui résulte d'un duo... Rires... Là, on continue sur la thématique des abris et le niveau suivant, c'est un format journal A3, dans lequel je demandais aux auteurs de travailler sur les petites annonces mais par rapport à tout ce qui est abri. Donc de créer des petites annonces sur les abris : tu dessine les abris et tu fais la petite annonce...
— C. de Trogoff Je peux poser une question ? L'idée de travailler avec des auteurs te vient rapidement, t'as pas envie de faire les choses en solo ? Une envie de travailler collectivement avec eux, ou juste de lancer des appels ?
— François De Jonge Je lance l'appel et je demande exactement ce que je veux.
— C. de Trogoff Alors est-ce que tu procèdes, comme on disait tout à l'heure, « je veux absolument ça, ça va prendre telle forme, il y a telle contrainte »...
— François De Jonge Je sais exactement ce que font certains auteurs, j'ai pas besoin de leur dire : « je veux ça, ça, ça »
— Alexandra Achard tu vas les chercher en fonction de ce que tu veux...
— François De Jonge Et il en a d'autres qui me plaisent pour, justement, voir s'ils peuvent pas faire autre chose que ce qu'ils font toujours.
— C. de Trogoff Là tu leur demande autre chose dans ces cas-là.
— François De Jonge Oui. C'est le premier journal du coup.
— C. de Trogoff Ce journal, les petites annonces, les abris, on est en quelle année ?
— François De Jonge Ça doit être en 2010.
— C. de Trogoff C'est récent finalement... On ira voir tout à l'heure ce que tu as sur ton stand, pour que Alexandra puisse voir... Je ne sais pas si t'as tout vu
— Alexandra Achard Alexandre (Balcaen) m'en a passé...
— François De Jonge Il y a eu 300 exemplaires.
— C. de Trogoff 300, qui sont bien partis ?
— François De Jonge Oui, sur deux ou trois années, en même temps, il y a le lancement avec une structure, enfin, ça peut être assez basique ; on travaille toujours en librairie encore, à ce moment-là, pour tous les lancements, avec la reprise de l'expo suivante. Du coup c'est en fonction des libraires qu'on peut faire ou pas des installations.
— C. de Trogoff Donc à ce moment-là tu fais des installations.
— François De Jonge Oui en carton encore.
— Alexandra Achard Du coup chaque livre est incomplet.
— François De Jonge Est incomplet ?
— Alexandra Achard Oui il faut le voir avec sa structure...
— François De Jonge Oui. Oui, et en même temps non : c'est plus le faire naître avec une structure mais par la suite je ne ramène jamais les structures avec les livres ça ferait ...
— C. de Trogoff Est-ce que tu prends des photos de ces structures ? Est ce que tu les remets dans les livres ? c'est une question : est-ce qu'il y a un retour ?
— François De Jonge À ce moment-là, c'est fait en une heure, je vais chercher le carton dans la rue
— C. de Trogoff Ah oui ! Ah, tu fais deux... ah d'accord...
— Alexandra Achard y'a l'éphémère et y'a ce qui reste.
— François De Jonge Ce qui reste à ce moment là, c'est le livre.
— C. de Trogoff Et tu la reprends pas cette structure elle est là...
— François De Jonge Non on la jette.
— C. de Trogoff Et est-ce que tu te fais aider pour faire ces structures sur place ?
— François De Jonge Non en fait ça va assez vite.
— C. de Trogoff Donc à ce moment-là tu as déjà une habileté de gestes presque coutumiers ; tu l'a fais beaucoup de fois ce moment-là, tu prends du carton dans la rue, tu y vas, tu passes un coup de blanc ou quelque chose...
— François De Jonge J'y vais la veille, la veille du lancement et je fais...
— C. de Trogoff un coup de blanc toujours, du rotring ?
— François De Jonge Non, non, à ce moment-là il y a plus trop...
— C. de Trogoff C'est quoi, alors, le carton ?
— François De Jonge C'est vraiment du socle, du support, un socle pour le livre.
— C. de Trogoff Ah d'accord, ce n'est plus une structure à côté du livre, ce n'est plus une habitation.
— François De Jonge C'est une structure qui abrite le livre, qui présente le livre.
— C. de Trogoff Il y a eu un petit changement quand même là déjà !
— François De Jonge C'est pas un changement, c'est le lieu qui permet ça : si tu me donnais un espace blanc avec une semaine pour présenter mon livre, évidemment je ferais une expo, il y aurait une installation beaucoup plus conséquente...
— C. de Trogoff D'où la question d'Alexandra, qui est très juste, est-ce que ça fait partie du livre ? Est-ce que c'est une extension au livre ? Ou un écrin ?
— François De Jonge À un moment ça fait partie du livre…
— C. de Trogoff À un moment ?
— Alexandra Achard Un écrin ou une rencontre...
— François De Jonge Un écrin c'est plus proche.
— C. de Trogoff Un boîtage, un écrin pour ton livre ?
— François De Jonge C'est une présentation du bouquin, comme ça pourrait être une présentation différente dans un autre lieu.
— C. de Trogoff ça le lance vers le lecteur, il appelle le lecteur...
— François De Jonge Bah forcément, il y a quelque chose d'incongru dans l'espace, qui ne ressembles pas au reste de l'espace.
— C. de Trogoff J'aurais bien voulu voir ça, j'ai jamais vu en fait.
— François De Jonge C'est du carton déchiré.
— C. de Trogoff C'est des choses qu'on peut voir, en ligne ? Il y a des photos ?
— François De Jonge Pas en ligne.
— Alexandra Achard C'est vraiment l'émancipation du livre, il quitte la maison familiale quoi, ciao by by, tu es né, tu es parti, laisse-nous tranquilles, on fera pas d'autre gosses...
— François De Jonge Tu as tous les stocks chez toi !
— Alexandra Achard Ça, on est pas sensé le savoir ! On espère qu'il n'y en a pas (rires)
— C. de Trogoff Question pratique : si jamais on a besoin de voir, tu as des photos de ça que tu peux éventuellement nous montrer ?
— François De Jonge Oui je peux vous trouver des photos.
— C. de Trogoff On verra ça après par mail, si jamais on a envie de compléter l'article... Donc, en on en est là, Superstructure est née, Superstructure vit.
— Alexandra Achard Les livres de Superstructure naissent, partent faire leur vie, une fois qu'ils ont quitté la maison...
— C. de Trogoff les métaphores filées... (Rires)
— François De Jonge Ouais, c'est... Euh, du coup, c'est un truc qui se répète, il y a d'autres livres qui sortent et tout...
— C. de Trogoff T'as d'autres envies, peut-être, à ce moment-là...
— François De Jonge on fait un solo avec Oriane Lassus, aussi, on fait des expos autour de ce journal aussi...
— C. de Trogoff Des expos, toujours autour du carton ?
— François De Jonge Le matériau évolue avec les connaissances, il y a le bois, il y a la palette, y'a des choses qui arrivent...
— C. de Trogoff On peut s'intéresser un petit peu, à comment arrivent les autres matériaux, comment tu les travailles ? Est-ce qu'il y a une différence ? Ou c'est juste des matériaux qu'arrivent ?
— François De Jonge Comme je te dis, par rapport au dessin, l'évolution du dessin.
— C. de Trogoff Ah, c'est toujours le dessin qui te mène vers un matériel ?
— François De Jonge À ce moment-là, je suis encore fort dans le dessin, aussi... Parce que je suis beaucoup moins dans le dessin maintenant qu'auparavant, je fais de temps en temps des livres mais c'est hyper sporadique...
— C. de Trogoff Tu faisais vraiment des extensions de dessins à un moment donné, des villes, des trucs qui prenaient des proportions... Des décharges...
— Alexandra Achard c'était énorme avec une minutie...
— C. de Trogoff Ça se dépliait en Superstructure, ça tu ne le fais presque plus, d'accord ?
— François De Jonge Ça, je ne le fais presque plus, en fait . Je ne le fais plus, et même, l'esthétique a évoluée, il n'y a plus trop ce truc de décharge, c'est plus clean, c'est plus la recherche d'autres formes maintenant.
— C. de Trogoff Donc le bois arrive en, en d'autres matériaux...
— François De Jonge Les palettes et tout ça, là, on arrivera à cette expo à Angoulême et à Bruxelles ; auparavant il y a eu Genève, il y a eu Lyon... Bruxelles encore et d'autres depuis... Toujours sur le même principe avec le matériau qui se modifie au fur et à mesure des expériences.
— C. de Trogoff Tu n'es plus du tout dans l'abri ?
— François De Jonge Si, ça reste toujours un lieu dans lequel tu rentres pour regarder les choses ; euh, au moment de ces trois expos je rencontre Sukrii Kural, qui est maintenant mon associé depuis trois ans. Avec lui on travaille sur les véhicules, on crée un livre de Superstructure qui s'appelle Véhicule passion du Speed, que l'on présente d'ailleurs à Angoulême et que personne ne lit. Enfin, dans le jury d'Angoulême parce que :on montre des voitures, c'est n'importe quoi ! Merci PLG... Vous le mettrez pas ça, hein !
— Alexandra Achard Si ! On met tout !
— François De Jonge Ça m'a un peu dégoûté ; j'ai arrêté de présenter des livres depuis, parce que si on donne une dizaine de livres à lire et que les mecs se donnent même pas la peine de lire, je vois pas pourquoi je perdrais un mois à faire ça...
— C. de Trogoff On doit donner 11 exemplaires, c'est ce qu'on a appris hier soir, pour un fanzine !
— François De Jonge tu étais dans le jury ?
— C. de Trogoff Non, figure-toi que Bien Monsieur était juste à côté de nous et a eu le prix, du coup j'ai appris à cette occasion... D'où la question : « quel fanzine peut se permettre de donner 11 livres comme ça ? » Faut déjà... Avoir les reins solides, quoi ! Nous on pourrait jamais. Nous ont fait 20 exemplaires, on va pas en donner 11, ça va pas non ? Si tu fais du livre objet ou des choses un peu minutieuses...
— François De Jonge Les choses évoluent même au niveau du prix fanzine, des fois, tu as de gros pavés comme ça qui gagne le prix et ça, ce genre de livre s'est tiré à 500, 1000 exemplaires, donc les gens peuvent se permettre...
— C. de Trogoff il y a eu Turkey à un moment...
— François De Jonge Le prix est faussé.
— C. de Trogoff ben, ouais.
— François De Jonge C'est pas logique de parler de prix « fanzine ».
— C. de Trogoff ils ne voient pas les fanzines finalement... À ce moment-là, j'aimerais poser une question : est-ce qu'il y a eu à un moment donné quelque chose qui est sorti du moule, à savoir tu fais tes expos, tes livres et
— C. de Trogoff Est-ce qu'à un moment donné il y a eu le matériau qui sort ?
— François De Jonge Bah oui, j'y arrive à ce moment-là. Pendant les expos, on crée le véhicule, donc il y avait un livre avec jaquette et plusieurs posters avec du papier journal à l'intérieur, il y a une recherche de papier, une recherche de couleurs aussi parce qu'il y a les posters qui sont en pantone, ce n'est plus de la quadrichromie...
— C. de Trogoff Tu prends en main ça, tu fais les choses.
— François De Jonge Non ça c'est fait par l'imprimeur, on n'a pas encore, enfin, on n'aura jamais d'imprimante offset
— C. de Trogoff Imprimante offset, non, mais on peut prendre en charge des petites parties
— François De Jonge Pour ce livre, on construit carrément une voiture une DeLorean En bois, en palette, pour le lancement... Qui dure une soirée, mais la voiture est en taille réelle.
— C. de Trogoff on rentre dedans, toujours, dans cette voiture ?
— François De Jonge Oui, oui, c'est l'expo et la voiture, il y a ça aussi : c'est que les installations commencent à vivre d'elles-mêmes.
— C. de Trogoff Ça c'est intéressant, l'objet sort, en fait, du livre...
— François De Jonge C'est plus forcément pour présenter l'objet...
— C. de Trogoff Ce n'est plus un écrin, c'est quoi alors ?
— François De Jonge C'est une install.
— Alexandra Achard Une relique.
— C. de Trogoff il y a un livre associé ou pas forcément ?
— François De Jonge Oui c'est le véhicule.
— C. de Trogoff le véhicule est un livre alors ?
— François De Jonge Oui.
— C. de Trogoff Le véhicule est un livre... On approche de nos marottes !
— Alexandra Achard Moi je fais des métaphores filées et j'écoute, en fait.
— C. de Trogoff (rires) Ouais ouais, elle va délirer, elle va partir en vrille (rires)
— François De Jonge Ouais... La voiture, le livre, là on fait un autre livre qui s'appelle « Formes et monuments » et là, on fait beaucoup plus de travail en termes d'impression et en termes de réflexion autour du bouquin...
— C. de Trogoff Tu peux de parler un peu de ça ?
— François De Jonge Alors on décide de prendre plusieurs techniques d'impression et de les superposer, et là on a de l'offset, de la Riso et du jet d'encre...
— C. de Trogoff Et qu'est-ce que tu prends en main ?
— François De Jonge La machine qu'on a, c'est la jet d'encre, et un ami qui travaille pour la Riso. Et pour l'offset, c'est l'imprimeur.
— C. de Trogoff Qui vient en dernier, du coup ?
— François De Jonge Non, l'offset c'est en premier !
— C. de Trogoff (rires)
— François De Jonge Si tu amènes de la Riso chez ton imprimeur offset, tu me donnes le numéro !
— C. de Trogoff Je me disais, « il ne fait pas ça quand même ! » Mais comme tu me l'a dit dans cet ordre là... C'est pas possible ?
— François De Jonge Non, la première base c'est l'offset.
— C. de Trogoff tu as toujours une base, qui est préparée et tu travailles dessus ?
— François De Jonge Tu travailles à même les documents ; on sépare les couches. Par exemple, un auteur dont on enlèverait, par exemple, le magenta qu'on ferait faire passer en rose en Riso, et par-dessus l'offset et inversement pour d'autres choses. On façonne le livre nous-mêmes et on le fait relier par le relieur du catalogue IKEA.
— C. de Trogoff Très bien, très bon choix ! (rires)
— François De Jonge On le savait pas, à ce moment-là, quand on est arrivés à la réunion pour la reliure, on ne savait pas du tout que c'étaient eux qui faisaient ça. On est entrés dans une espèce de bureau ovale et on a vu plein de...
— C. de Trogoff De meubles ! (Rires)
— François De Jonge Non, de catalogues... On s'est dit : « c'est bizarre, pourquoi ils ont plein de catalogues ? »
— C. de Trogoff Ils ont une manie ! (Rires)
— François De Jonge On commence à réfléchir en fait, c'est eux qui... C'est eux... Et nous on arrivait avec un livre a relier à 300 exemplaires, dos carré, coupé, du coup c'était vraiment...
— C. de Trogoff Du coup, c'est toi qui conçoit les maquettes des livres avant même que... ?
— François De Jonge Non, on est deux dessus.
— C. de Trogoff vous travaillez ensemble à ce moment-là ou... ?
— François De Jonge Moi je travaille à la mise en page, donc sur le fil des pages. Sukrii, lui, il travaille sur les couches, donc il sépare les couches de certains travaux et il fait le chemin
— C. de Trogoff Le chemin de fer?
— François De Jonge Non ça c'est moi
— C. de Trogoff Ah oui ! Le plan – comment on appelle ça ? – la fiche technique des différentes impressions...
— François De Jonge Après, vu qu'on assemble nous-mêmes pour pas aller chez l'imprimeur, il y a toujours des choix qu'on peut encore faire pour intervertir des pages.
— C. de Trogoff Des fois vous changez à un moment donné malgré le plan, quoi ?
— François De Jonge Des fois on fait ça, il y a un moment où on se concerte à deux pour réfléchir sur le chemin de fer.
— C. de TrogoffOk. Du coup au moment où vous en êtes à la conception du livre, quand vous êtes à la manipulation — monter les cahiers etc.
— Alexandra Achard vous êtes deux, vous demandez de l'aide ?
— François De Jonge Oui on est deux, des fois on trouve des gens qui peuvent nous aider... On est de tempérament un peu stressé et on y va rapidement, nous, en fait… Et en général quand les gens arrivent, c'est un peu mou, du coup, ça nous énerve alors on le fait à deux, ça va aller beaucoup plus vite.
— C. de Trogoff Ou ils ne font pas bien?
— François De Jonge C'est plutôt pas assez vite, c'est stressant, en plus y'a des détails à chaque fois...
— C. de Trogoff Combien d'exemplaires ?
— François De Jonge Là on est à 500 exemplaires, mais ça reste toujours autour de 500 exemplaires.
— C. de Trogoff Que vous montez tous les deux ?!
— François De Jonge Oui... c'est de pire en pire.
(rires)
— C. de Trogoff Mais pourquoi ce choix de monter tant d'exemplaires ? C'est une question intéressante...
— François De Jonge Si on le publiait à 300 exemplaires... ça on le colle à la main, ça Sukrii le relie, il en a 300 à relier au fil, euh, il y a cinq cahiers à plier-relier, voilà on cherche plus à savoir si c'est trop pas...
— C. de Trogoff Mais pourquoi ce choix au départ?
— François De Jonge Parce que ça coûterait trop cher!
— C. de Trogoff Pour tous les consommables jets d'encre et tout ça, il faut faire un gros nombre? C'est ça que tu veux dire ?
— François De Jonge Non c'est même pas ça, enfin oui par rapport au offset, mais maintenant tu peux trouver des choses à 100 exemplaires...
— C. de Trogoff Parce que tu aurais pu te dire : « on en fait 20, quoi ».
— François De Jonge Non non ! Y' a des fanzines qu'on fait à 20 exemplaires ou 30, enfin ça varie entre 30 et 50 pour ce qui est fanzine. Par rapport à l'offset et tout ça, quand tu dis « pourquoi ? » c'est parce que, en fait, quand on envoie les fichiers, on nous les renvoie en rame et de là, c'est nous qui les plions parce qu'on a encore beaucoup de travail à faire dessus en fait, sur les pages.
C.Oui vous revenez tout le temps sur les pages en fait.
— François De Jonge Oui, dès qu'il y a de la Riso, t'es obligé de revenir...
— C. de Trogoff [au micro] François nous montre, comment s'appelle cet... « homme camouflage »
— François De Jonge Pas « hommes », « home » comme maison!
— C. de Trogoff Ça, c'est magnifique !
— François De Jonge Bah ça, c'est une surprise on va pas divulguer comment on le fait...
— C. de Trogoff D'accord.
— François De Jonge Mais tu peux regarder
— C. de Trogoff Il y a une très jolie petite… Chose à l'intérieur...
— François De Jonge Qui brille… Bientôt on divulguera !
— Alexandra Achard Moi j'ai été attirée immédiatement…
— François De Jonge Donc, on envoie cette double page en recto-verso chez l'imprimeur offset, pour qu'il imprime juste les ronds ; donc on a sélectionné juste les ronds, donc on a sélectionné le vert, on l'a enlevé et on envoie juste les ronds à l'imprimeur pour qu'il imprime.
— C. de Trogoff Une pause, non, pour prendre une photo ?
— François De Jonge De toute façon vous allez l'acheter… Tu l'as déjà acheté ?
— C. de Trogoff Elle l'a déjà !
— Alexandra Achard Non, non, mais je vais aller l'acheter.
— François De Jonge Il en reste sept...
— Alexandra Achard Je vais pas en acheter sept !
— François De Jonge Ça part vite, on est dimanche ! (Rires) tu devrais y aller !
C Il y a toute une page en effet où il y a on peut pas appeler ça des ronds, des formes, c'est doux
— François De Jonge Ça, c'est de la Riso.
— Alexandra Achard Ah ! C'est génial que ça reste sur les doigts !
— C. de Trogoff La couche verte est en Riso et ça c'est de l'offset… Donc, les ronds sont faits en premier et la Riso va recouvrir ?
— François De Jonge Exactement
— Alexandra Achard On le voit.
— C. de Trogoff Avec des caches ?
— François De Jonge Non, parce qu'en Riso, tu envoies un fichier, tu colles par les...(rires), t'imagines, « vous faites ça tout seul ? » (Rires) « oui on a 10 trous et on les cache ! »
— C. de Trogoff Tu peux me dire n'importes quoi, je te croirai !
— Alexandra Achard On retranscrit directement, si tu dis n'importe quoi, ça n'engage que toi !
— C. de Trogoff En fait, tout est possible, parce que ça me paraît déjà tellement fou que tu peux vraiment dire n'importe quoi !
— François De Jonge On fait de la cuisine, par exemple il y en a d'autres : ici, là, c'est Monsieur Pimpant qui a fait ce dessin, chez l'imprimeur offset on la fait tirer en noir...
— C. de Trogoff Donc un fond noir...
— François De Jonge Non, enfin...
C.Y'a des nuances…
— François De Jonge Et par-dessus, on a été en laser recouvrir la couche blanche, enfin la couche grise plutôt parce que les blancs sont pas au milieu.
— C. de Trogoff On obtient une sorte de marron, brun...
— Alexandra Achard C'est l'expérimentation des techniques, la rencontre des deux techniques, industrielles en fait.
— C. de Trogoff Avant de la faire, vous imaginez le résultat, vous y pensez ou c'est de l'expérimentation, vous essayez plusieurs fois ?
— François De Jonge Des fois, on sait exactement, des fois… par exemple, pour celui-là, c'est en fonction de ce qui se passe à côté aussi qu'on regarde si on peut pas relancer le truc. Génial ! Là, on est juste dans nos préoccupations.
— François De Jonge On fait un premier exemplaire relié-coupé, dans lequel on regarde ce qu'il y a moyen de faire encore.
— Alexandra Achard Les frictions, ce qui se passe, les rencontres…
— C. de Trogoff Regardons ça : par exemple sur une page comme ça, vous la pensez en amont puis vous faites une expérimentation éventuellement pour voir si ça marche, et ensuite vous regardez avec…
— François De Jonge On fait pas forcément d'expérimentation, on regarde d'abord si ça marche sans…
— C. de Trogoff Mais pour faire comment ça rend, vous faites des essais ?
Oui. Mais ensuite, on regarde d'abord s'il y a moyen de le faire encore au niveau de tout le bouquin, on coche les choses intéressantes…
— C. de Trogoff Ce que tu disais tout-à-l'heure : des changements de pages et
— C. de Trogoff
... Au dernier moment.
— François De Jonge Exactement.
— C. de Trogoff Et du coup pour relier, c'est relié en cahiers cousus ?
— François De Jonge Cahiers cousus.
— C. de Trogoff Ensuite encollés ?
— François De Jonge Non.
— Alexandra Achard 300 exemplaires… Il y a de la corne un peu au bout des doigts ?
— François De Jonge Sukrii, il en a, oui. Il relie, moi je coupe.
— Alexandra Achard Il a des dés intégrés?
— François De Jonge Il a de gros ongles.
— C. de Trogoff La couverture, du coup, elle est...
— François De Jonge La couverture, c'est un cello qui est encollé double face sur la première et la dernière page.
— C. de Trogoff Je cherchais comment c'était encollé… D'accord, montre-moi.
— François De Jonge Je vais pas tirer trop.
— C. de Trogoff Non, mais montre-moi, que je vois avec mes yeux… Il y a du double face, je le dis pour le...
— François De Jonge Pour la reliure. Et coller les premières et dernières pages du bouquin.
— C. de Trogoff Magnifique !
— François De Jonge On l'a choisi en tant que couverture, on l'a demandé à l'auteur en tant que couverture, nous on a fait le design autour, mais le dessin c'était la couverture… la forme c'est elle qui a décidé ; on connaît son travail, on sait à quoi…
— C. de Trogoff Et ici vous collez ? Comment vous faites ?
— François De Jonge On a une découpeuse.
— C. de Trogoff Une « silhouette », une « Caméo silhouette » ? Ça marche bien? Juste parce que nous on voudrait en acquérir...
— François De Jonge Pas pour tout, mais super!
— C. de Trogoff J'avais peur, un peu, que ce soit un jouet, là j'ai découpé 30 pops-up à la main j'aurais aimé être relayée par une machine.
— François De Jonge C'est chouette. Mais ça fait un boucan de dingue, c'est pas très agréable.
— C. de Trogoff Laquelle vous avez pris ?
— François De Jonge La "Caméo silhouette" mais l'ancien modèle, on prendra la nouvelle quand on aura beaucoup d'argent.
— C. de Trogoff Avec cette « Caméo silhouette » vous découpez la forme, vous envoyez le fichier la machine –Je vois maintenant comment ça marche– et, attends ! Elle est magnifique !
— François De Jonge Ah ! Tu viens de capter ?
— C. de Trogoff Oui parce que mes yeux voient par couches...
— François De Jonge Ah oui d'accord.
— C. de Trogoff Ils voient des choses, ils découvrent des choses puis ils revoient d'autres choses. Je viens de tourner la page j'ai vu ça et je vois ça maintenant, tu vois ?
— François De Jonge Bah oui.
— Alexandra Achard Ça m'a fait le même effet.
— C. de Trogoff Je suis pas… Non plus…
— François De Jonge J'étais super content quand on a vu que ça marchait...
— C. de Trogoff Tu viens d'avoir la preuve sur place, que ça marche très bien, puisque je viens de le percevoir.
— François De Jonge Du coup on les colle un a un.
— C. de Trogoff Tu peux dire tout ce que tu veux ,je te croirais toujours maintenant ! (rires)
— François De Jonge C'est vrai! Donc, on fonctionne par façonnage de 30 exemplaires à chaque fois.
— C. de Trogoff Ah oui ,ça c'était la question à laquelle…
— François De Jonge On fait pas 300 exemplaires d'un coup. Par contre, tout ce qui est impression est déjà fait.
— C. de Trogoff Je me doutais. Du coup, c'est sur combien de temps ?
— François De Jonge Tout est imprimé. Il y a juste à plier et à coudre.
— C. de Trogoff Vous avez tout l'offset qui est fait et par tranche de 30 exemplaires… Vous façonnez de A à Z ou par tranches encore ?
— François De Jonge Comment ça ? 30 exemplaires ; à la fin des 30 exemplaires, on a 30 exemplaires présentables.
— C. de Trogoff Est-ce que vous faites par tranches de travail ? Par exemple : toute la Riso où tout le bouquin à chaque fois ?
— François De Jonge Ce que je voulais, c'était que toute la Riso est faite...
— C. de Trogoff ça, sur les 300 exemplaires ?
— François De Jonge Tout ce qui est en tirage…
— C. de Trogoff Ensuite il reste tout ce qui est à coller, découper et tout ça, et là vous faites par tranche de 30 bouquins, don— C. de Trogoff À la demande ?
— François De Jonge Suivant les événements.
— Alexandra Achard Est-ce que, dans les processus comme ça — imaginons que là il y en a 30 qui sont faits… — vous allez en refaire 30 plus tard ; est-ce qu'il peut y avoir des modifications ?
— François De Jonge Oui.
— C. de Trogoff Ah, très intéressant ! Allez vas-y.
— François De Jonge Tout à fait.
— C. de Trogoff On peut savoir sur quel type d'exemplaires on est ?
— François De Jonge Par exemple là, tu es sur cette page, et on va arrêter de passer au laser par-dessus parce que ça donne moins bien, en fait.
C.C'est cette partie qui est laser ?
— François De Jonge C'est le noir, tout ce qui est décalé.
— C. de Trogoff Et en dessous c'est quoi ça ? Riso ?
— François De Jonge On fait jamais de la Riso sur du papier couché, ça marche pas !
— C. de Trogoff Olala ! Elle est trop nulle ! C'est elle, la technicienne ! Tu as souri comme si…
— François De Jonge C'est mignon c'est pas moqueur.
— C. de Trogoff C'est elle la technicienne, moi je sais rien !
— François De Jonge Non, c'est très mignon parce que, moi aussi, je suis passé par là et on s'est aussi foutu de ma gueule. Mais moi, je me fous pas de la tienne !
— C. de Trogoff C'est du papier couché ça, déjà je sais ce que c'est ! Et la Riso…
— François De Jonge La Riso, ça n'accroche pas.
— C. de Trogoff On nous a proposé un bouquin en riso à Fumetti (salon de bande dessinée à Nantes, avec lequel C. de Trogoff et L.L. de Mars ont réalisé Billy the Kid, en Riso).
— François De Jonge La Riso, c'est de la poudre, il n'y a pas de fixatif.
— C. de Trogoff C'est une sorte de tonner. J'avais trouvé que ça avait bavé, mon dessin était pas bien sorti.
— François De Jonge C'est moins fin. C'est très diffus donc…
— C. de Trogoff Ici, la base, c'est de l'offset et du laser par-dessus ?
— François De Jonge Oui mais on va l'enlever parce que…
— C. de Trogoff C'est du laser à vous ? Une Brother ?
— François De Jonge C'est le musée avec lequel Sukrii travaille (ndlr : musée Arts & Marges, Bruxelles) qui nous permet de pouvoir de temps en temps imprimer des trucs.
— C. de Trogoff Et pour le papier ? Comment vous choisissez le papier ? D'ailleurs, vous avez des fournisseurs ?
— François De Jonge Pour ce coup là l'impression offset s'est faite par pixartprinting, donc on a pas beaucoup de choix. On a pris un bouffant et un couché.
— Alexandra Achard Vous ne fournissez pas votre propre papier ?
— François De Jonge Chez eux, ça marche pas.
— C. de Trogoff Donc, il y a des choses qui vont se modifier suivant les premiers 30 exemplaires. Donc tu peux situer la première couche, deuxième couche, troisième couche d'exemplaires ?
— François De Jonge Même la reliure a déjà évolué.
— Alexandra Achard C'est les 30 premiers là, non ?
— François De Jonge Non, les 30 suivants. On est a 60, à peu près, mais entre les 30 premiers et les 30 suivants il n'y a pas de modifications au niveau des impressions. Par exemple, là, on a arrêté de mettre le dos parce que le dos...
— Alexandra Achard Pour les prochains ?
— François De Jonge Pour ceux qu'on a ici, ça c'est un exemplaire que j'ai, que je garde ; normalement à la base, le cello il est recto-verso, du coup premier et quatrième de couv'… Ici on a fait un cello premières de couv', dos, et un cello quatrième de couv'.
— C. de Trogoff D'accord, c'est plus pratique, c'est quoi ces des problèmes de…
— François De Jonge parce que quand tu mets un seul cello, le c'est la première page qui est collée et ça fait un truc un peu dégueulasse et des fois mêmes quand c'est trop serré...
— C. de Trogoff Là, c'est la résistance du matériau ce dont parlait tout à l'heure parfois vous rencontrez des résistances qui vous font changer la forme ? C'est ce dont je te parlais…
— François De Jonge Ouais ouais.
— C. de Trogoff Donc, ça c'est un exemple. Tu as d'autres exemples comme ça, où c'est le matériau qui vous oblige à modifier la forme que prendra l'objet ?
— François De Jonge Bin, l'impression par exemple, ce que je te montrais tout à leur, Pimpant, à la base on pensait pas faire une couche laser. C'est le fait d'avoir quelque chose à côté qui a donné envie de ne pas avoir juste une double page noir et blanc
— C. de Trogoff Là, c'est le contexte…
— François De Jonge Qui nous a donné envie de rajouter une couleur.
— C. de Trogoff C'est le contexte, mais est-ce que parfois c'est quelque chose que vous imaginiez et qui marche pas, comme pour la couverture ? Est-ce que ça arrive aussi dans l'impression ? Des choses comme ça, et est-ce que parfois… Quand l'impression offset arrive chez vous, vous vous dites « c'est pas du tout ça et on va essayer de la modifier »…
— François De Jonge Oui oui...
— C. de Trogoff « Cette esthétique on va la modifier par nos interventions »
— François De Jonge Là, honnêtement, j'avais un bouquin que je voulais présenter Angoulême. C'était mon dernier, je l'avais fait imprimer chez Pixartprinting. C'était du noir qu'on avait envoyé, et les types nous ont renvoyé les impressions en couleurs : en noirs colorés.
— C. de Trogoff Et ça peut être joli, remarque...
— François De Jonge Oui, mais là, c'était dégueulasse. Du coup, ce qu'on s'était dit, c'est qu'on allait repasser à certains endroits des noirs profonds en laser. Sauf que le problème c'est que…
— C. de Trogoff En recouvrant donc ?
— François De Jonge Ou en dépassant juste en prenant des formes
— C. de Trogoff Génial!
— François De Jonge En créant un deuxième passage
— C. de Trogoff Une sorte de pochoir.
— François De Jonge Mais vu que l'imposition était déjà faite sur des A3 en bord perdu, la machine laser qu'on a…
— C. de Trogoff elle prend jamais tout. Ça c'est l'horreur ! C'est horrible !
— François De Jonge C'était tout en décalage...
— C. de Trogoff Avec l'équipement ça fait toujours plein de problèmes…
— François De Jonge Ou alors découper en A4 mais on était à deux jours du festival.
— C. de Trogoff Je comprends.
— François De Jonge Du coup, on a commencé ces 20 exemplaires et au dernier moment on s'est dit : « on va pas le présenter, on va le refaire en mieux pour la prochaine fois ». Il y aura toujours des prochaines fois.
— C. de Trogoff Euh...
— François De Jonge Oui, on peut dire aussi qu'on fera pas les livres en fonction des festivals…
— C. de Trogoff Non, je pensais à la mort en faite…
— Alexandra Achard (rire)
— C. de Trogoff « Il y aura toujours une prochaine fois » tu dis… Donc (rires).
— François De Jonge Pour le livre, oui. Il y en a qui nous remplaceront quand on sera mort et qui feront d'autres livres ! (En aparté, à Alexandra) Pour faire les typons de la sérigraphie, l'imprimante elle te prend pas les bords, et du coup t'a pas tes bords de coupe…
— Alexandra Achard J'avais bien compris que c'était ce genre de problème.
— François De Jonge C'est pour ça qu'on a préféré ne pas le présenter, pour pas avoir un mauvais retour de ce que ce travail pourrait donner ; du coup on les donne à nos amis.
— C. de Trogoff Est-ce que avec les année tu as l'impression que la prise en main des moyens de production technique…
— François De Jonge Tiens un auteur qui travail pour Superstructure
— C. de Trogoff De toute façon, tout-à l'heure, on va aller à ton stand et on va regarder tout ça.
— François De Jonge Quand tu veux, on est tous là-bas.
— Alexandra Achard À côté des cafés.
— François De Jonge C'est visitable.
— C. de Trogoff Donc, la prise en main de tes moyens techniques influence, en fait, la forme de ton travail ; c'est-à-dire, la possession de la Riso etc. Est-ce que ça...?
— François De Jonge Oui avec la Riso, on va presque jamais utiliser du bleu marine, du vert sapin — enfin si le vert sapin il y a certaines couleurs…
— C. de Trogoff Oui, ça c'est les contraintes de la technique mais est-ce que… la technique te donne envie de faire des choses ?
— François De Jonge C'est là où je voulais en venir : si tu enlèves la couche magenta pour mettre un rose fluo en Riso c'est pas pour rien : ça crée une tension entre les couches, entre les couleurs offset et la couleur Riso.
— C. de Trogoff Hmm, hmm.
— François De Jonge C'est juste remplacer une couleur offset.
— C. de Trogoff D'accord... ouais ouais.
— François De Jonge Euh...
— C. de Trogoff Du coup tu les prends main comme des pinceaux quoi. Tous les outils deviennent ton pinceau, ta palette et tu les modèles... Du coup le carton, les abris tout ça c'est bien loin.
— François De Jonge C'est bien loin ? Non, ça juste évolué vers d'autres matériaux, comme le béton, comme l'installation de plus petits objets qui ne sont pas forcément...
— C. de Trogoff tu fais encore les installations ?
— François De Jonge Oui, enfin, encore des installations avec des livres. On m'appelle aussi pour faire des installes pas forcément avec les livres.
— C. de Trogoff D'accord il y a une séparation…
— François De Jonge L'installe a trouvé sa propre vie aussi et c'est suivant…
— C. de Trogoff Comme deux casquettes.
— François De Jonge Voilà.
— C. de Trogoff Il y a des gens qui te demandent… C'est plus forcément l'écrin du livre, plus du tout même!
— François De Jonge Non non.
— C. de Trogoff Alexandra ?
— Alexandra Achard Moi j'ai une question, parce qu'il y a une utilisation des procédés techniques, une réalisation mécanique des productions. Jamais vous ne réintervenez manuellement, à la main, rapport direct, sans outil?
— François De Jonge On l'a fait un moment, mais ça faisait… ça faisait bricolage en fait. Bêtement on trouve les procédés mécaniques qui vont remplacer, qui peuvent nous remplacer...
— Alexandra Achard C'est pas bêtement, du coup c'est la même chose si on veut intervenir
— C. de Trogoff Comme un outil...
— François De Jonge On a un livre qui s'appelle Chrome noir — excuse-moi
— Alexandra Achard Tu me touches du bout du doigt, mais je ne suis pas un livre.
— C. de Trogoff Elle est un livre en devenir, en fait !
— François De Jonge On a un livre qui s'appelle Chrome noir ; c'est un livre que j'ai dessiné et il est sous blister, sous pochette plastique…
— Alexandra Achard Parle un peu anglais !
— C. de Trogoff Bliister!
— François De Jonge Blister, c'est pas la ville en Angleterre.
— Alexandra Achard Allez allez!
— François De Jonge Oui parce que moi je dois aller vendre des livres après!
— C. de Trogoff Nous on doit aller les regarder.
— Alexandra Achard On va les acheter.
— C. de Trogoff On va aller les regarder.
— François De Jonge Achetez ! Achetez !
— C. de Trogoff Regarder, j'ai dit!
— François De Jonge Tu regardes et tu achètes. Sur le blister on a utilisé la Caméo pour pouvoir écrire Superstructure au feutre ; on l'a pas juste utilisé en découpeuse mais en reproducteur.
— Alexandra Achard Alors quoi ? Tu remplaces tes lames par un feutre ? Attends, je comprends pas tu remplace tes lames ?
— François De Jonge Oui il y a une option ; vous le savez même pas ? Mais vous avez une Caméo ou quoi ?
— C. de Trogoff Non, j'ai tout fait à la main moi, je t'ai dit ! Bon merci François…
— François De Jonge C'était deux question. Vas-y : deux minutes !
— C. de Trogoff Ce qu'on pourrait se dire, c'est que si on a des questions, on se revoit à Bruxelles ou autre. Ou par mail on pose des questions. Et on va t'accompagner à ton stand pour voir des choses avec toi.
— François De Jonge À Bruxelles on pourra se voir avec Sukrii, ça pourrait être pratique parce qu'ici, ça va nulle part.
— C. de Trogoff Nous on doit aller à l'expo Adverse ; oui, ça nous intéresse carrément.
— Alexandra Achard . Moi je veux bien un comme ça.
— François De Jonge Non, tu peux pas acheter celui-là il est mal relié…
— Alexandra Achard Mais j'aime bien. J'ai acheté un livre là-bas, avec une dédicace du mauvais auteur.
— C. de Trogoff ça c'est cool. C'est encore drôle ; elle est dans les trucs collector qui sont pas vraiment les bons trucs, avec les défauts.
— Alexandra Achard bon on arrête ici l'entretien.
— François De Jonge ça devient malsain...

 


1. Nos restes, cofondé avec Carl Roosens et Alexandre De Moté