Conférence de presse du comité de soutien :

Hier, près d'une centaine d'habitants de Tarnac et alentour, voire même de tout le plateau, se sont rassemblés pour partager leurs sentiments sur ce qui s'est passé mardi. Il a été décidé de monter un comité de soutien dont voici la communication.

Elle est lue par Michel Gillabert, installé depuis quelque temps dans la commune voisine de Tarnac à Rempnat.

Cela fait déjà maintenant trois ans que je viens régulièrement en Corrèze et plus particulièrement sur le plateau de Millevaches, pour y retrouver des amis dans différents lieux, et entre autres au Goutailloux.





L'atmosphère qui a régné hier soir entre nous était un mélange de colère, d'incompréhension, et du sentiment effrayant d'une disproportion, d'une démesure humiliante. A cette occasion, un réel et très émouvant soutien s'est exprimé de la part de beaucoup des habitants de la commune et de ses environs. Il faut dire que les événements de mardi avaient de quoi impressionner. En effet, 150 policiers ont bouclé le village, paralysé la vie communale. Le village a été envahi par une armada de policiers encagoulés, d'un hélicoptère, de chiens renifleurs d'explosifs, de policiers en blouse verte, de préleveurs d'ADN et de journalistes, beaucoup de journalistes.

Les dépêches AFP tombent à 8h30 du matin, comme si les journalistes avaient déjà écrit leurs papiers avant d'arriver sur la commune.

Un dispositif antiterroriste mais pas de terroristes pour leur rendre la réplique dans cette pièce de mauvais goût. En effet, quelques heures après, ce que les enquêteurs constatent, ceux qu'ils rencontrent, c'est monsieur et madame tout le monde.

Pourtant les termes sont lâchés, comme on lâche des chiens ultra-gauche, terrorisme, mouvance anarcho-autonome, terroriste, violence, terreur, libertaire, anarchiste, nihiliste, groupuscule, commando, et j'en passe...

Ces termes, dès le début, ont servi à briser la présomption d'innocence, à rendre tout le monde coupable de terrorisme, termes chocs, qui cristallisent la peur des gens, et masquent une toute autre réalité, partagée ici.

Dans ce contexte, 6 personnes ont été arrêtées.

Pour le moment, la police cherche à trouver les coupables pour des histoires de caténaires sur les lignes SNCF, pas même ces affaires de plaques en béton sur les rails de trains. On est très loin d'une attaque au gaz dans le métro Parisien. Même le chef de la DCRI a indiqué récemment "il n'y a pas de mise en danger de vies humaines dans cette affaire".

Mais de quoi s'agit-il ici? D'une commune qui a accueilli des jeunes, des amis sont venus les voir, certains sont restés, ou reviennent, certains ont repris l'épicerie, d'autres font de l'agriculture, d'autres organisent des activités culturelles, ou comme moi, maîtrisent un savoir-faire, la taille de pierre. Les gens se retrouvent sur des échanges de savoirs, des échanges de moyens, des coups de main, chers à la tradition des gens d'ici. Comment peut-on parler de planque ou de clandestinité alors qu'il s'agit d'abord ici de fuir l'anonymat et l'agressivité des métropoles?

Mais ce qui pour nous est important à relever ce soir, c'est le caractère indécent, disproportionné et scandaleux de cette descente policière à Tarnac. Je n'ai pas besoin de répéter qu'on a là affaire à une opération médiatique et politique. Le triomphalisme du gouvernement, la rapidité d'intervention de la police après les sabotages, la disproportion du dispositif policier et médiatique, le flou général qui entoure cette ultra-gauche "qui ne revendique rien et n'est pas structurée" (Michèle Alliot-Marie) indiquent une volonté de produire du coupable chère à un gouvernement désavoué par ses politiques économiques et sociales qui subissent actuellement une crise sans précédent.

De telles pratiques politiques anti-terroristes ont d'ailleurs déjà été dénoncées, notamment par le syndicat de la magistrature dans un communiqué du 26 juin intitulé "la direction des affaires criminelles voit des terroristes partout". Nous vivons dans une période ou les mouvements sociaux, de plus en plus rares, ne freinent en rien une situation générale qui empire chaque jour. Ces grandes démonstrations de force continuent à alimenter la paranoïa installée en occident depuis le 11 septembre surtout lorsque la police opère dans le cadre d'une juridiction d'exception (garde à vue prolongée, accès restreint à un avocat, motif d'inculpation et concept judiciaire malléable à merci).

Nous pensons beaucoup à nos amis qui se trouvent enfermés en ce moment, et nous demandons leur libération immédiate et la création de comités de soutien partout.