Rozenn EON
Ibidem

Cette nouvelle Cut-Up de rozenn Eon a été publiée aux Editions K'De M en 1995.
Consultez aussi les nombreux travaux disponibles sur ce site qui sont liés, de près ou de loin, au cut-up, à cette page 



 

Avant-propos
 
 
1)Ici le hasard jouera comme un révélateur et permettra de gagner du temps dans l'habitude. Mais il serait dérisoire de lui accorder une trop grande part, surtout au regard de l'intuition: exercice de mise à jour, ce qu'il va devoir mettre en ordre: moment essentiel qui tente d'en percevoir les ouvertures, les percées, d'en assumer l'approfondissement possible.
Lire comme suit: il n'avancera rien qu'il ne sache prouver.

2)Ce premier niveau défini de l'instruction, un autre fait irruption, d'attitudes dictées; imprévisibles, qui demandent pour ces raisons des solutions improvisées pragmatiques. Second degré débutant avec les premières manifestations de la volonté. Au besoin on se servira de l'expérience ou de constructions fantasmatiques également érronées. Le langage, manier
l'abstraction, l'analyse, le pluriel.

3) La ligne de partage: le mobile

4) Il est cependant probable que la substitution d'identités ait été accompagnée d'un sensible glissement de l'enquête puisque le principe n'avait à l'origine aucune signification. Une araignée tissant sa toile, minutieusement compartimentée selon un point central. (Point focal) ici manquant, inexistant, hors-de-propos= le cadavre et, à travers lui, l'idée même de crime.


En tuant votre âge semble
vous rendre poli le vivant

Voilà maintenant un an, un mois que le souvenir même vous intéresse. Je vous vois beaucoup. Nous prendrons une référence,n'est-ce-pas, au mépris de la circonstance afin de vous mais n'oubliez pas je voulais tout y voir, j'ai voulu venir pour m'éloigner de ce qui se dit m'y confondre. Je n'envisageais pas, je voulais écrire et Je suis allé voir, je regardais, je me
serais épuisé à vouloir tout contrôler (nous autres disait-il vivons pour savoir de quoi peut bien être hérissé notre intérieur d'honnête homme). Et aujourd'hui c'est Poulenc qui prend des clichés et les retouche. Minutieusement. Un bestiaire en somme. Pour le reste. En fait je voudrais être seul! Il est mort en 1987.

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dont le grap
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Je dois enregistrer une maquette; elle doit contenir tout ce que j'avais rencontré quelques années auparavant. Un contrat. Pour pouvoir recommencer. En sept mois, un peu plus, comme on apprend le piano. Enregistrer des maquettes. Rebet que j'avais rencontré quelques années auparavant m'a demandé d'enregistrer des maquettes. Un contrat pour pouvoir
recommencer.
a été enn
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paroles
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Vous semblez d'une grande patience. Ciselés.  Cela m'évite une prétendue maturité. Dans l'affaire. «Quant à la photographie par Brown du Printemps de Botticelli ou au moulage de la Femme Inconnue du musée de Lille, qui, aux murs et sur la cheminée des chambres de Maple, sont la part concédée par William Morris à l'inutile beauté, je dois avouer qu'ils
étaient remplacés dans ma chambre par une sorte de gravure représentant le prince Eugène, terrible et beau dans son dolman, et que je fus très étonné d'apercevoir une nuit, dans un grand fracas de locomotives et de grêle, toujours terrible et beau, à la porte d'un buffet de gare, où il servait de réclame à une spécialité de biscuits». Voilà, nous y sommes: à
s'évertuer à convertir l'ennui en profession de foi; distribuer avec parcimonie quelques avis sur la question, être on-ne-peut-plus-vivant tout de même et par conséquent avoir à faire. Forcément. Je n'ai à faire qu'à m'y perdre, jusqu'au dégoût. De l'expérience. Savoir que cet ennui est la seule chose stable depuis. Le seul indice qui trahisse -rarement- les émo
tions: le plus puissant, soupçonné du pire...


Avertissement

« La pensée est la pensée de la pensée »
 James JOYCE
 

Réquisitoire

« Je fais ma mort » cite-t'il.

Franchissant le seuil de la salle d'audience, je me tenais là debout droit exactement parallèle aux pilliers qui me cadraient. Trois minutes viennent de tomber, celle où la porte se referme semble la plus longue, aveugle. Le bruit sec de la serrure me fait redouter le lieu du discours. Nul doute que notre inéluctable confrontation vous permettra d'être juge. Ici
par exemple assis résolus à constater le sort de quelqu'un d'autre, détachés. De tout cela, de cette évidence synchronique, il n'avait rien conçu. Ce dont peut-être il avait eu l'idée, c'est qu'une fois le massacre accompli, il ne lui restait plus qu'à se suicider. A un autre qui aurait fait ce qu'il avait fait ne restait, contingente, que cette décision la plus sommaire.
Dans son amnésie (banale), il achevait le massacre.
On pourrait ainsi formuler une hypothèse policière mais le calcul pouvait lui avoir été dicté par l'usage. Le bon sens. La volonté d'éprouver au plus près, en une sorte d'intimité meurtrière, le rachat qui précède la convenance. Car il jouissait de l'estime de ses contemporains. Ses semblables. Appelés à témoigner en sa faveur, la plupart resteraient prudents: ils n'avaient pas à s'en plaindre, il les avait toujours traités avec déférence.

Puisqu'il est dit pour tous que la possibilité de penser sa propre mort repose sur un malentendu linguistique, alors la peine capitale, le crime légal, la bonne conscience de l'extermination tempérée (leur reste la traduction politique de leur insatisfaction): la mort de l'autre allait de soi. La mise à mort consubstantielle à l'état policier, suspendue au-dessus de tout ce qui pourrait se tourner contre lui, prête à s'abattre sur quiconque lui porterait atteinte. Jusqu'à en menacer celui ceux qui n'aurai(en)t que l'intention d'attenter à l'autorité collective. Rien que le projet de fustiger l'idéologie totalitaire derrière laquelle se range la grande marche en avant populaire rythmée par un hymne national à la mode. En progrès. Et à celui-là, il
faudra que la mort soit infligée parce que toute autre condamnation y paraîtrait une absolution.
Donner la mort, encore une fois, en toute précaution.
Dans cette attente, l'emprisonnement à perpétuité fabrique de toutes pièces in-pace des adeptes de la chaise électrique. Pour en finir. Et les bonnes gens invoqueront la faillite du système. Convoqueront l'Histoire. L'Histoire en train de se faire, englobant dans un même mouvement son objet et sa fourberie. Mais est-ce vraiment mon affaire d'établir s'ils la
méritent pour la leur infliger?


Epigraphe

« Nous sommes même las d'être des hommes, des hommes ayant un corps véritable qui soit notre propre corps et notre sang; nous en avons honte, nous le considérons comme une opprobe et nous nous efforçons d'être des individus moyens fictifs. Nous sommes mort-nés, et il y a bien longtemps que nous ne naissons plus de pères vivants, et cela nous plaît
de plus en plus. Nous y prenons goût. Bientôt, nous trouverons le moyen de naître d'une idée.»
Fiodor DOSTOIEVSKY, A propos de neige fondue,
1864

Parallaxe

Tout a été fait et d'ailleurs il n'y avait rien d'autre à faire. C'est pourquoi tout sera fait et d'ailleurs il n'y aura rien d'autre à faire. «Je suis mort»  cite-t'il.
Me semble t-il la seule forme de rhétorique que vous m'accordiez, j'évince le ressort de la culpabilité, c'est la plainte. Malheur, trois fois malheur aux pères infirmes qui nous ont fait rachitiques et mal venus, prédestinés que nous sommes à n'enfanter que des mort-nés. Arrivé au bout, il y en a toujours un qui gigote dans la toile d'araignée. Mais le refus est un principe qui a une force telle qu'on peut être sûr de ne pas se tromper même si on reste le seul à le soutenir.
Je suis mort maintenant et je tâche de vivre, assez bien ma foi, au sein d'une dictature du bon gré, et tous ensembles amnésiques, qui assure ma: respectabilité, mon: confort acquiesçant à l'union et à l'harmonie requises. La bonne éducation reste le remède le plus convenable à la haine de l'autre. Le plus grand succès des pays démocratiques n'est-il pas que leurs habitants aient réduits leurs haines conflictuelles à l'échelle d'une indifférence polie? Ne rien y perdre, n'y rien gagner mais être en règle. Non pas une prière, rien qu'un souffle, pas un souffle, rien que de la bonne volonté, pas de bonne volonté, rien qu'une pensée, pas une pensée, rien qu'un sommeil paisible. Je suis fatigué. Se peut-il qu'il n'y ait que la douleur qui rende dramatique le fait que j'eusse un corps, fusse un corps?
Dès 1938 prénoms obligatoires sur les papiers d'identité puis l'étoile jaune en 1941. Au moment de son arrivée au pouvoir le National -Socialisme dans un geste de mansuétude a voulu mettre ses adversaires hors d'état de lui nuire mais aussi les protéger contre la colère publique en finir avec les assassinats de coin de rue régénérer les brebis égarées et les ramener à une plus saine conception de la communauté allemande de sa destinée et du rôle de chacun en son sein le National-socialisme a été dépassé par les évenements et par ses agents mais c'est par humanité que quelques juifs ont tout d'abord été conduits à l'est dans des camps de détenus protégés comme bien avant Jésus-Christ l'avaient fait page 29
les égyptiens qui ne trouvaient que ce moyen de rendre les juifs inno fens ifsàleur pros péritéetmêm e babylonequin e
connutsonapogéemerveilleusquegrâceauxconcentrationnairestoutcommeles ang laisetenrussieouenespagnlesfranç...
Epargnez-moi...

(« La mort est quelque chose d'inouï » cite-t'il)



Avertissement

« Je préfère remplir les trous ». L'institutrice expliqua
alors que l'écolière voulait parler des problèmes de
grammaire souvent conçus pour remplacer les poin
tillés par le nom convenable ou le temps voulu.
 

L'enfouissement des cadavres
 

D'un regard circulaire, plongeant, de gauche à droite, porté, soutenu au centre, vous distinguerez avec peine dans une étendue sableuse un monticule de terre plus lourde en retrait des allées raides, piètre érection aux vues du monument de raison qui lui en-face dérobe toute attention. Ainsi la place honorante et recueillante, festive, pourrait bien être réser
vée à ces orthostates ornées. C'est dans le faste qu'on y enterre, et les épitaphes laïques rappellent sans doute quelques ex-actions patriotiques, comme aux grands jours du sacrifice, allant au combat pour assurer la paix française. S'y mèlent une piété et un culte troublants (puisqu') à quelques mètres, colmaté, le ressentiment creuse une fosse commune. C'est
dans l'oubli qu'on y descend les inciviques, au fond de l'abîme collective. Si près les uns des autres, pourritures mêlées: il s'agit d'une cavité assez profonde au pied d'une locution voilée. C'est le même lieu souterrain, subordonné, particulier au demeurant. L'ossuaire béant dont on extrait parfois un crâne d'étude. Et le tout est si dangeureusement silencieux.
Il existe ainsi, à l'intérieur, un fardeau, l'oeil, qui lui empêche, vu, incarné, ombre, la chute ou le Salut. Et l'on parvient aisément, tibias croisés, à ne plus apposer sur chacun d'eux aucune naissance, intention: métonymies osseuses disloquées dont on a hâtivement éradiqué l'humanité. Et là nul fécial ne rappelera les noms qui s'y entassent.

Quelconque de ma part, la parole me garde mieux que le silence. Ma tête de mort paraîtra dupe de son expression. Je songe alors à mon tour pouvoir m'agenouiller au bas du catafalque étincelant d'indulgence pour y admirer, la vertu, les dorures et les corniches marquettées des sarcophages des grands hommes, la patrie reconnaissante. Ceux-là mêmes
au grand mérite de faire valoir le bon droit, les assassins légaux quand la plupart se voyaient uniformes, l'impunité éclairée.

Telle, qu'il est des biais à la forme la plus savante du nationalisme, le positivisme, qui entretiennent les caveaux et cultivent la vénération. L'exhortant dans un monumentum achevé, comme dégagée des vicissitudes de la dépouille et de sa puanteur.
La fabrique du Soldat Inconnu n'a pas le goût de la glèbe, ni celui de la chair brûlée. Lever des Couleurs fors de notre passé, pleins de foi en l'avenir, rendons à la France une âme collective! En cadence, figure consacrée, le célèbrissime poilu vaut pour tous les autres. Donc pour aucun. Et les tranchées sont bien refermées. On dira de lui qu'on l'a honoré. Il est déli
vré chaque année aux veuves, ascendants et descendants des premier et second degrés, un permis de transport gratuit pour aller visiter les tombes de leurs parents morts pour la France, inhumés en lieux fixés par l'autorité militaire. Cette faculté est également accordée dans les mêmes conditions aux parents de militaires disparus pour se rendre aux cimetières où sont inhumés des militaires inconnus susceptibles par le lieu de leur disparition d'être considérés comme leur appartenant. Ces dispositons sont étendues dans les mêmes conditions aux familles des victimes civiles de la guerre dont l'acte de décès
porte la mention "Mort pour la France".
Puis la tombe fleurie du Maréchal. Pas de sang sur les mains. Passent à travers. Pas par opportunisme mais ce qu'il convient de faire (de faire ce qu'il faut) pour les héros. La rumeur publique aura chassé les ombres de sa face. On y érigera un mausolée. Ou un sépulcre.
En ce pays d'une honorable mort, à n'y voir plus aucun cadavre mais un cénotaphe. Y sommes-nous élégants le jour où la pensée des foules se porte pieusement vers les morts, le jour où les mains se tendent affectueusement vers les hommes illustres de la Grande Tourmente?
La décomposition est répugnante mais les hommes ont dépensé beaucoup d'argent pour rendre leurs morts translucides; figés pour le compte de démonstrations que l'on voudrait exemplaires; une suite d'équations où l'on se meut sans y donner beaucoup.
Et c'est là sans doute le sens profond du macabre, le renversement des figures ayant jailli comme une évidence. Le discours s'organise alors, marque un temps d'arrêt. Et parvient, victorieux, à la mise à distance, pratique publique, les catacombes émergeant comme des signes visibles de la pérénité de la cité, infaillible et souveraine. C'était une éblouissante dé
monstration, le public hurla son approbation



cite-t'il.

Prétexte
 
 

Mais le couvercle est ôté, la tombe... Nos sépultures sont vides mais nos cimetières sont éloquents. Excusez cette apparence de défaut dans nos rapports. Je ne saurai jamais m'expliquer. Ma parole! Voilà bien un seul vocable qui m'autorise, au gré des rubriques, dans le défilement des mots lâchés, à n'en embrasser aucun sans, jamais, m'en défaire, au risque du doute. Le vôtre soupçonnant la confidence, y être morcelé, profanant les tombes ouvertes pour alimenter les cours d'anatomie. La citation est sybilline, l'aveu de mauvais aloi. Ma langue
y sera                     toujours de seconde main     celle que l'on admet et que l'on réitère, celle que l'on suppose,
de source collective en d'habiles et singulières greffes. A n'en pas douter. De tels prélèvements indissolublement liés dans un paysage commun, là où le corps devrait se fonder sur une clôture de la chair sur elle-même!
Comment pourrais-je être en train d'y mentir lorsque ce dont vous m'accusez s'irrigue de votre propre im
posture?
En un répertoire nommé réifiant          en un bestiaire traditionnel toutes sortes d'équivalences entre images et attributs.             Articulées. Pour peu qu'on y laisse faire l'expérience abusée de bonne volonté. Plutôt la péripétie que l'économie dans l'imminence. Sa forme majeure, soustraite par amalgame à l'ensemble des possibilités qui s'offraient à nous (en mettant cette virgule, j'ai vu que seule la première phrase était juste).
Notre premier mobile et coetera et coetera du baume dans ma bouche déssechée du texte gisant comme un semi-cadavre en guise de sinécure. Je pourrais redouter alors qu'un moindre assentiment de votre part en soit, disons, hypotéqué, par crainte naturellement, à mesure du parcours, de s'y sentir bafoué en quelque sorte, dupe d'un manque d'inspiration. Il se
peut alors que vous ayez raison.
Je fais mon trou.
Je ne me rendrais jamais.
 



 
Voilà maintenant un an, un mois que le souvenir même vous intéresse1/Je vous vois beaucoup2/ Nous prendrons une référence,n'est-ce-pas, au mépris de la circonstance afin de vous3/ mais n'oubliez pas je voulais tout y voir, j'ai voulu venir pour m'éloigner de ce qui se dit m'y confondre4/ Je n'envisageais pas, je voulais écrire et5/ Je suis allé voir, je regardais6/ je me serais épuisé à vouloir tout contrôler7/ (nous autres disait-il vivons pour savoir8/ de quoi peut bien être hérissé notre intérieur d'honnête homme)9/ Et aujourd'hui c'est Poulenc qui prend des clichés et les retouche10/ Minutieusement11/ Un bestiaire en somme12/ Pour le reste13/ En fait je voudrais être seul!14/ Il est mort en 198715/ lou, je me16/ dont le grap17/ "i", s'acco18/ chansonn19/ c'est la leg20/ texte qui21/ violence e22/ déja de la23/ Je dois enregistrer une maquette; elle doit contenir tout ce que j'avais rencontré quelques années auparavant24/ Un contrat25/ Pour pouvoir recommencer26/ En sept mois, un peu plus, comme on apprend le piano27mination tempérée (leur reste la traduction po litique de leur insatisfaction): la mort de l'autre allait de soi70/ La mise à mort consubstantielle à l'état poli cier, suspendue au-dessus de tout ce qui pourrait se tourner contre lui, prête à s'abattre sur quiconque lui porterait atteinte71/ Jusqu'à en menacer celui ceux qui n'aurai(en)t que l'intention d'attenter à l'autorité collective72/ Rien que le projet de fustiger l'idéologie totalitaire derrière laquelle se range la grande mar che en avant populaire rythmée par un hymne natio nal à la mode73/ En progrès74/ Et à celui-là, il faudra que la mort soit infligée parce que toute autre con damnation y paraîtrait une absolution75/ Donner la mort, encore une fois, en toute précaution76/ Dans cette attente, l'emprisonnement à perpétuité fabrique de toutes pièces in-pace des adeptes de la chaise électrique77/ Pour en finir78/ Et les bonnes gens invo queront la faillite du système79/ Convoqueront l'Histoire80/ L'Histoire en train de se faire, englobant dans un même mouvement son objet et sa fourberie81/ Mais est-ce vraiment mon affaire d'établir s'ils la méritent pour la leur infliger?82/ Tout a été fait et d'ailleurs il n'y avait rien d'autre à faire. C'est pour quoi tout sera fait et d'ailleurs il n'y aura rien d'autre à faire83/ « Je suis mort » cite-t'il84/ Me semble t-il la seule forme de rhétorique que vous m'accordiez, j'évince le ressort de la culpabilité, c'est la plainte85/ Malheur, trois fois malheur aux pères infirmes qui nous ont fait rachitiques et mal venus, prédestinés que nous sommes à n'enfanter que des mort-nés86/ Arrivé au bout, il y en a toujours un qui gigote dans la toile d'araignée87/ Mais le refus est un principe qui a une force telle qu'on peut être sûr de ne pas se trom per même si on reste le seul à le soutenir88/ Je suis mort maintenant et je tâche de vivre, assez bien ma foi, au sein d'une dictature du bon gré, et tous en semble amnésiques, qui assure ma: respectabilité, mon: confort acquiesçant à l'union et à l'harmonie requises89/ La bonne éducation reste le remède le plus convenable à la haine de l'autre. Le plus grand succès des pays démocratiques n'est-il pas que leurs habitants aient réduits leurs haines conflictuelles à l'échelle d'une indifférence polie?90/ Ne rien y perdre, n'y rien gagner mais être en règle91/ Non pas une prière, rien qu'un souffle, pas un souffle, rien que de la bonne volonté, pas de bonne volonté, rien qu'une pensée, pas une pensée, rien qu'un sommeil paisible92/ Je suis fatigué93/ Se peut-il qu'il n'y ait que la douleur qui rende dramatique le fait que j'eusse un corps, fusse un corps? Dès 1938 prénoms obligatoi res sur les papiers d'identité puis l'étoile jaune en 194194/ Au moment de son arrivée au pouvoir le Na tional-Socialisme dans un geste de mansuétude a voulu mettre ses adversaires hors d'état de lui nuire mais aussi les protéger contre la colère publique en finir avec les assassinats de coin de rue régénérer les brebis égarées et les ramener à une plus saine conception de la communauté allemande de sa desti née et du rôle de chacun en son sein le national so cialisme a été dépassé par les évenements et par ses agents mais c'est par humanité que quelques juifs ont tout d'abord été conduits à l'est dans des camps de détenus protégés comme bien avant Jé sus-Christ l'avaient fait page 29 les égyptiens qui ne trouvaient que ce moyen de rendre les juifs inno fens ifsàleur pros péritéetmême babylonequin e connutso nap ogéemerveilleusqueg râceauxconcentrationnairestoutcommelesang laisetenrussieouenespagnlesfranç95/ Epargnez-moi96/ « La mort est quelque chose d'inouï » cite-t'il97/ D'un regard circulaire, plongeant, de gauche à droite, porté, soutenu au centre, vous distinguerez avec peine dans une étendue sableuse un monticule de terre plus lourde en retrait des allées raides, piètre érection aux vues du monument de raison qui lui en-face dérobe toute attention98/ Ainsi la place hono rante et recueillante, festive, pourrait bien être réser vée à ces orthostates ornées99/ C'est dans le faste qu'on y enterre, et les épitaphes laïques rappellent sans doute quelques ex-actions patriotiques, comme aux grands jours du sacrifice, allant au combat pour assurer la paix française100/ S'y mèlent une piété et un culte troublants (puisqu') à quelques mètres, col maté, le ressentiment creuse une fosse commune101/ C'est dans l'oubli qu'on y descend les inciviques, au fond de l'abîme collective102/ Si près les uns des autres, pourritures mêlées103/ il s'agit d'une cavité as sez profonde au pied d'une locution voilée104/ C'est le même lieu souterrain, subordonné, particulier au demeurant105/ L'ossuaire béant dont on extrait parfois un crâne d'étude106/ Et le tout est si dangeureuse ment silencieux107/ Il existe ainsi, à l'intérieur, un far deau, l'oeil, qui lui empêche, vu, incarné, ombre, la chute108/ ou le Salut109/ Et l'on parvient aisément, ti bias croisés, à ne plus apposer sur chacun d'eux aucune naissance, intention: métonymies osseuses disloquées dont on a hâtivement éradiqué l'humanité110/ Et là nul fécial ne rappelera les noms qui s'y entassent111/ Quelconque de ma part, la pa role me garde mieux que le silence. Ma tête de mort paraîtra dupe de son expression112/ Je songe alors à mon tour pouvoir m'agenouiller au bas du catafalque étincelant d'indulgence pour y admirer, la vertu, les dorures et les corniches marquettées des sarcopha ges des grands hommes, la patrie reconnaissante113/ Ceux-là mêmes au grand mérite de faire valoir le bon droit, les assassins légaux quand la plupart se voyaient uniformes, l'impunité éclairée114/ Telle, qu'il est des biais à la forme la plus savante du nationa lisme, le positivisme, qui entretiennent les caveaux et cultivent la vénération115/ L'exhortant dans un monu mentum achevé, comme dégagée des vicissitudes de la dépouille et de sa puanteur116/ La fabrique du Soldat Inconnu n'a pas le goût de la glèbe, ni celui de la chair brûlée117/ Lever des Couleurs118/ fors de notre passé, pleins de foi en l'avenir, rendons à la France une âme collective!119/ En cadence, figure consacrée, le célèbrissime poilu vaut pour tous les autres120/ Donc pour aucun121/ Et les tranchées sont bien refermées122/ On dira de lui qu'on l'a honoré123/ Il est délivré chaque année aux veuves, ascendants et descendants des premier et second degrés, un per mis de transport gratuit pour aller visiter les tombes de leurs parents morts pour la France, inhumés en lieux fixés par l'autorité militaire. Cette faculté est également accordée dans les mêmes conditions aux parents de militaires disparus pour se rendre aux cimetières où sont inhumés des militaires inconnus susceptibles par le lieu de leur disparition d'être con sidérés comme leur appartenant. Ces dispositons sont étendues dans les mêmes conditions aux fa milles des victimes civiles de la guerre dont l'acte de décès porte la mention "Mort pour la France"124/ Puis la tombe fleurie du Maréchal125/ Pas de sang sur les mains126/ Passent à travers127/ Pas par opportunisme mais ce qu'il convient de faire (de faire ce qu'il faut) pour les héros128/ La rumeur publique aura chassé les ombres de sa face129/ On y érigera un mausolée130/ Ou un sépulcre131/ En ce pays d'une ho norable mort132/ à n'y voir plus aucun cadavre mais un cénotaphe133/ Y sommes-nous élégants134/ le jour où la pensée des foules se porte pieusement vers les morts, le jour où les mains se tendent affectueuse ment vers les hommes illustres de la Grande Tour mente?135/ La décomposition est répugnante mais les hommes ont dépensé beaucoup d'argent pour rendre leurs morts translucides; figés pour le compte de dé monstrations que l'on voudrait exemplaires; une suite d'équations où l'on se meut sans y donner beaucoup136/ Et c'est là sans doute le sens profond du macabre137/ le renversement des figures ayant jailli comme une évidence. Le discours s'organise alors, marque un temps d'arrêt. Et parvient, victo rieux, à la mise à distance, pratique publique, les catacombes émergeant comme des signes visibles de la pérénité de la cité, infaillible et souveraine138/ C'était une éblouissante démonstration, le public hurla son approbation139/ cite-t'il140/ Mais le couvercle est ôté, la tombe141/ Nos sépultures sont vides mais nos cimetières sont éloquents142/ Excusez cette apparence de défaut dans nos rapports. Je ne saurai jamais m'expliquer143/ Ma parole! Voilà bien un seul vocable qui m'autorise, au gré des rubriques, dans le défilement des mots lâchés, à n'en embrasser aucun sans, jamais, m'en défaire, au risque du doute. Le vôtre soupçonnant la confidence, y être morcelé, profanant les tombes ouvertes pour alimenter les cours d'anatomie. La citation est sybilline, l'aveu de mauvais aloi. Ma langue y sera toujours de seconde main celle que l'on admet et que l'on réitère, celle que l'on suppose, de source collective en d'habiles et singulières greffes. A n'en pas douter. De tels pré lèvements indissolublement liés dans un paysage commun, là où le corps devrait se fonder sur une clô ture de la chair sur elle-même! Comment pourrais-je être en train d'y mentir lorsque ce dont vous m'accu sez s'irrigue de votre propre imposture? En un réper toire nommé réifiant en un bestiaire traditionnel tou tes sortes d'équivalences entre images et attributs. Articulées. Pour peu qu'on y laisse faire l'expérience abusée de bonne volonté144/ Plutôt la péripétie que l'économie dans l'imminence145/ Sa forme majeure, soustraite par amalgame à l'ensemble des possibili tés qui s'offraient à nous146/ (en mettant cette virgule, j'ai vu que seule la première phrase était juste147/. Notre premier mobile et coetera et coetera du baume dans ma bouche déssechée du texte gisant comme un semi-cadavre en guise de sinécure148/ Je pourrais redouter alors qu'un moindre assentiment de votre part en soit, disons, hypotéqué, par crainte naturelle ment, à mesure du parcours, de s'y sentir bafoué en quelque sorte, dupe d'un manque d'inspiration149/ Il se peut alors que vous ayez raison150/ Je fais mon trou151/ Je ne me rendrais jamais152