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Décrire la musique d'Émile Belan, est-ce seulement possible ? Par exemple de donner son dispositif — Jeudi 18 décembre, à la Fondation Argentine de la Cité Universitaire de Paris s'est tenu un concert de l'ensemble Ryôan-Ji. A ce concert ont été entendues trois pièces du compositeur Émile Belan. La première pièce est en fait triple, il s'agit des trois pièces, 1977, 1979 et 1983 qui ont été jouées simultanément par trois musiciens sur trois installations sonores mettant en jeu des frottements très amplifiés. Puis sept musiciens, Elodie Dusuzeau (percussions), Vincent Bellat (percussions) et Fanch Thoraval (violoncelle), d'une part et David Besson (percussions), Alice Broilliard (violoncelle), Margot Belan (percussions) et Maxime Oudry (contrebasse) se sont divisés en deux groupes distincts dans l'espace d'une salle de 80 mètres carrés pour jouer les Premières pièces en carré (pour un ou plusieurs groupes de un à seize musiciens - cordes frottées et percussions). De même, après un entr'acte, furent jouées les secondes Pièces en carré pour un ou plusieurs groupes de un à plusieurs musiciens - toutes sources sonores, dans le cadre de ce concert ces secondes Pièces en carré furent interprétées par trois groupes de musiciens, le premier constitué d'Émile Belan et Vincent Bullat aux pianos, mélodica et autres objets sonores, et de Franz Loriot, divers objets, un deuxième groupe constitué par Maxime Oudry à la guitare électrique et un troisième groupe formé par Margot Belan percussions diverses et amplifiées. Ces trois groupes étaient pareillement disséminés dans la pièce d'approximativement 80 mètres carrés dans laquelle fut joué ce concert. Les spectateurs étaient également dispersés dans la pièce, et purent, discrètement, changer de point de vue et d’écoute pendant ce concert — est-ce que cela décrit la musique?

D'en donner quelques clefs de compréhension - les explications confuses des musiciens tentant de me faire comprendre le fonctionnement de leurs partitions et des symboles qui y sont utilisés ressemblaient tout de même aux cours de ce professeur de calligraphie chinoise aux Arts Décos, il ne parlait pas du tout français, nous ne parlions pas chinois, mais nous aimions tous l'odeur de l'encre — est-ce l'expliquer ou rendre les choses plus confuses encore?

Je me souviens qu'à un moment je trouvais très désopilant de lire les critiques de concerts de musique classique que je n'avais pas entendus de pièces que je ne connaissais absolument pas, j'y lisais notamment, tandis que je n’ entends rien à la musique, que tel chef était vanté pour sa rigueur métronomique qui seyait tout particulièrement bien à Bartòk, et un mois plus tard je lisais, dans le même journal, donc sans doute de la même plume, que telle ou telle formation de musique de chambre avait un goût subtil pour les arrangements et les couleurs, parfois au défaut d'un peu de rigueur métronomique mais comme ils jouaient Bartòk, ce n'était pas si grave.

Je n'entends rien à la musique.