Philippe a les foies pas possible. Il déteste
prendre la parole en public. Je joue au con avec la très efficace
tactique du type qui fait semblant de vous rassurer en faisant le contraire
(il suffit, par exemple, de prendre un ton très doux pour dire
à celle qui s'inquiète d'une petite grosseur au sein que
la mammoplastie a fait d'extraordinaires progrès et que, aujourd'hui,
les coutures ne se voient presque plus).
Quand nous débarquons à l'Université à 8h30,
je découvre que ce n'est pas du tout la fac de socio qui pilote
ce colloque, mais celle d'infocom. Manquait plus que ça. C'est
encore pire que ce que je croyais. Ne me demandez pas ce que c'est, infocom,
personne ne sait très bien. L'UFR a dû naître d'une
plaisanterie un soir de cuite, dans les années 70, entre deux profs
n'ayant jamais fini leur mémoire de linguistique et s'étant
endormis à l'exam de psycho et un de leurs copains dont la boîte
de pub avait fait faillite. Depuis, la plaisanterie dure toujours. Le
salmigondis mécaniste à la sauce sémiotique qui sert
d'axe à ce parent pauvre de l'Université aurait sans doute
fait poiler cette ahuri de Mac Luhan lui-même. Philippe, dont la
bonté d'âme n'a son pareil que dans les imagiers catholiques
pour enfants du tiers-monde, ne veut pas croire que tout soit aussi saumâtre
que le laisse entendre mon infatiguable mauvaise foi teigneuse. |